Comme la majorité des Réunionnais, nous avons appris par la presse le jeudi 5 décembre que l‘ARB et la Région Réunion organisaient dimanche 8 décembre le Gayar Pik Nik. Une célébration de la biodiversité réunionnaise. Un moment de sensibilisation à la richesse du patrimoine naturel des Réunionnais et à la promotion de pratiques écoresponsables avec un objectif de zéro déchets. Cela sur 6 lieux emblématiques de l’île, dont… Grand Anse !
Nous saluons cette ambition pour que les habitant.es deviennent des acteurices de la protection de la biodiversité en adoptant des gestes concrets. Malheureusement, trop souvent, on fait surtout porter les efforts sur les citoyens. Et les décisions politiques, pour empêcher des projets susceptibles de détruire la biodiversité, sont trop rarement prises. Encore et encore, les décideurs refusent de considérer l’avis des scientifiques, des ONG et des citoyen.nes.
Un cas d’école : le projet d’agrandissement du bassin de baignade de Grand Anse voulu par la mairie de Petite-Ile. La DEAL a donné son feu vert, le préfet le donnera probablement et pourtant :
– 18 scientifiques spécialistes du corail à La Réunion dénoncent ce projet : absence de garantie sur la résilience du corail, perte d’habitat et une plage qui devrait disparaître plus rapidement;
– 16 associations de défense environnementale et citoyenne signataires d’un courrier du 11 novembre 2024 ;
– 67 % des personnes qui ont participé à l’enquête publique ont donné un avis négatif, avis dont l’enquêteur public n’a pas tenu compte ;
– environ 6 000 personnes ont signé cette pétition contre les travaux : https://agir.greenvoice.fr/petitions/les-recifs-de-grande-anse-menaces-protegeons-cette-oasis-de-vie-corallienne
Tou.te.s demandent à la mairie de revoir ce projet, pour concilier préservation de l’environnement, l’aspect culturel du site et l’attrait touristique.
Tou.te.s refusent de faire le même pari que la mairie, c’est-à-dire, détruire l’existant et parier sur la résilience de cet écosystème, qui ne s’appuie sur aucune preuve scientifique.
Le seul argument avancé est la réussite du bassin, en 1984, alors que les impacts du réchauffement climatique ne s’étaient pas encore emballés, que le tourisme à La Réunion était encore timide et que l’aménagement du territoire n’avait pas encore imperméabilisé les sols.
Grand Anse c’est un taux de recouvrement du corail entre 0 et 15 m de 54 %, contre 18 % en moyenne sur les autres récifs.
Grand Anse, s’est un bassin dans lequel œufs et juvéniles de vertébrés et invertébrés trouvent un abri et où même des hippocampes ont été observés !
Grand Anse, c’est un récif qui devrait être protégé dès janvier 2025, aussi comme rempart aux évènements extrêmes liés au réchauffement climatique global de la Terre.
Grand Anse, c’est un réservoir de biodiversité qui alimente les récifs de l’Ouest. Attaquer le récif de Grand Anse, c’est attaquer les récifs de l’Ouest et donc inévitablement, rendre la population côtière plus vulnérable aux cyclones de plus en plus intenses.
Alors quelle désagréable surprise, que de tomber sur le panneau de permis d’aménager du bassin en date d’avril 2023 fraîchement et fièrement planté face à la houle du jour, qui seront bientôt, par sa faute, remplacés par un monstre mécanique, broyeur d’écosystèmes, asphysxieur de coraux par sédiments, creuseur de piscine à touristes ou scolaires recouverts de crème solaire, destructeur du vivant, de l’avenir de nos marmay… et tout cela pour la modique somme de 3 ans de travaux (sans compter les retards) et 7 millions d’euros.
Quelle étonnante surprise, alors que M. Latron, préfet de La Réunion nouvellement nommé, n’a pas donné son aval sur ce projet ! (il n’a pas encore statué).
Quelle aigre surprise de constater que le permis d’aménager a été délivré plus d’1 an avant le résultat de l’enquête publique…
A côté de nous, tout aussi désemparée que nous et les personnes avec qui nous avons échangé sur le gazon et le sable blanc ce matin, l’association BIOMA, qui nous a confié ces quelques lignes, à communiquer aux Réunionnais :
« Le récif corallien de la baie de Grand Anse est l’un des deux spots les plus riches et préservés de l’île avec un taux de recouvrement encore assez élevé comparé aux zones dégradées. La sédimentation est la principale menace qui pèse sur ces écosystèmes à La Réunion, notamment avec les coulées de boue. Des travaux importants dans le bassin et à proximité pour augmenter sa profondeur risquent d’impacter négativement le récif (destruction directe des parâtes dans le bassin et sédimentation sur les récifs situés en arrière). Or ces récifs fournissent de nombreux services éco systémiques comme la protection face à la houle et à la montée des eaux, la formation de sable corallien, des services récréatifs (baignade) et économiques (tourisme, plongée) et cela sans contrepartie. »
Ce dont les Petits-Ilois ont besoin, ce dont les Réunionnais ont besoin, c’est que l’argent public et les subventions européennes, soient dépensés dans des projets pour lequel ils se sont prononcés pour, à la majorité.
Qui fait le pari que ce projet est réellement d’intérêt public ? Qu’en penserait un juge ?
La coordination Greenpeace
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