[ÉDITO] La politique de la « reconnaissance »

Il est tellement content, le président de notre conseil départemental. Il est tellement content, Cyrille Melchior, parce que le gouvernement a soulagé la collectivité qu’il préside du RSA, qu’il en vient à soutenir Emmanuel Macron pour un second mandat.

Non, il ne s’agit pas de saluer la politique de destruction des services publics, la politique qui permet aux milliardaires d’augmenter de plus de trente pour cent leurs fortunes en un an, la politique qui met les pauvres dans la rue et envoie la police pour seule réponse aux revendications sociales.

Non plus pour les réductions attendues de nos droits à la retraite, au chômage, à la santé. Il n’en a cure, Cyrille Melchior, car «il faut avoir de la reconnaissance », peu importe s’il se détourne ainsi de la candidate qui représente sa famille politique. 

C’est grave. Non pas la trahison, le monde politique y est habitué, mais la raison invoquée. C’est l’argument massue de toutes les élections locales, c’est l’argument qui reconnait sans complexe le clientélisme, l’achat de voix et la corruption. « Il faut avoir de la reconnaissance. »  

Contre un petit boulot à la mairie, au Département ou à la Région, « il faut avoir de la reconnaissance »; contre le déclassement d’un terrain, « il faut avoir de la reconnaissance »; contre une subvention, un billet d’avion, « il faut avoir de la reconnaissance ».

Mais la politique n’est-elle pas au service de la population et du bien commun? L’emploi n’est-il pas offert en échange d’une compétence et de force de travail, le permis de construire n’est-il pas accordé dans le cadre d’un harmonieux aménagement du territoire, la subvention ou le billet d’avion pour faire fonctionner l’économie le sport ou la culture?

Il faut croire que non. Ces mesures ne sont pas décidées pour le bien commun, mais en échange d’une « reconnaissance ». Toutes ces politiques, ces décisions, nous seront rappelées à l’heure des élections: il faudra faire preuve de reconnaissance.

Philippe Nanpon

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