Le cancer, maladie systémique à causes multifactorielles ?

LIBRE EXPRESSION

Une querelle au sein de l’Institut Pasteur devrait nous interpeller à propos de la lancinante question du cancer, le différent qui toucha le biologiste Mirko Beljanski « ostracisé » par le Nobel Jacques Monod.

Je dois cette découverte des travaux de Mirko Beljanski (1923-1998), (1), directeur de recherche au CNRS, à ceux de Rosine Chandebois (1928-2019), (2), professeur de biologie et embryologiste. 

Celle-ci bouscule le savoir « institué », pourrait-on dire, comme le fit Beljanski qui osa contester son patron à l’institut, oui ! le grand Jacques Monod (1919-1976), lauréat du Nobel en physiologie et médecine en 1965. 

Lorsque celui-ci publiait « Le hasard et la nécessité », où est développé ce qui devint un dogme, à savoir l’ADN ne pouvant recevoir d’informations ni des ARN ni du cytoplasme, il affirmait : « Il n’est ni observé, ni d’ailleurs, concevable, que l’information soit jamais transférée dans le sens inverse », voir pp. 124-129.

Rosine Chandebois (qui s’opposera également au dogme) se recommandera du biologiste Pierre Grasse (1895-1985). Celui-ci soutient que « la découverte d’enzymes capables d’utiliser l’ARN viral comme matrice pour la synthèse de l’ADN est considérée comme une révolution en biologie moléculaire. Ce point de vue est déterminant pour envisager l’importante nouveauté concernant le rôle des virus dans la genèse des cancers ». 

A cette même époque Beljanski disait : « J’ai démontré qu’il était possible de transformer des bactéries à l’aide d’ARN provenant d’autres bactéries, ce qui implique l’existence d’une transcriptase inverse. Immédiatement, je suis la cible des critiques acerbes devant mon supérieur hiérarchique, car Jacques Monod venait de prendre publiquement une position absolument en contradiction formelle avec de telles données ».

Et 50 ans plus tard, nombre de chercheurs en génétique ont maintenant recours à un nouveau concept, celui de « l’épigénétique », indissociable du terme « génétique », signant ainsi la fin du « tout génétique » !

Sollicitons encore Beljanski. Pour lui, « tous les cancérogènes, sans exception, qu’ils soient mutagènes ou non, déstabilisent encore plus les ADN cancéreux déjà pré-déstabilisés, et par là-même, stimulent la multiplication des cellules cancéreuses et celles donnant des métastases », p. 27, réf (1).

Nous reviendrons sur cette « déstabilisation » ontogénétique des ADN.

Le cancer, nous l’avons qualifié, pour tenter de l’expliquer, par « l’exo-symbiose des mitochondries à l’origine des cellules cancéreuses », argumentant qu’elles avaient conservé leur propre ADN pour s’extraire des cellules, fuyant un contexte cellulaire délétère et devenant immortelles en boîte de pétri. Un vitalisme anarchique ?

Le « puzzle » explicatif semble se confirmer progressivement en désignant l’environnement cellulaire comme « terreau »  propice  à cancérisation  qu’il convient d’explorer plus avant. 

  1. Les découvertes objectives sur le vivant devraient confirmer certaines déductions empiriques et cliniques, comme celles de Paul-Joseph Barthez, médecin et botaniste de Montpellier qui défendait le « vitalisme » que l’on retrouverait à tous les niveaux d’organisation du vivant ; et que nous avons associé chez l’humain au « désir » de se maintenir en vie. 

Sur le plan historique, nous devrions mentionner l’étude « Biopathie du cancer » (publiée aux USA en 1954) du psychiatre Wilhelm Reich (1897-1957). En précurseur le psychiatre évoquait déjà la fragilisation « bio-ionique » des cellules pour ne pas dire ontogénétique de l’ADN, qui de son temps était impensable. Il fut lui aussi ostracisé et décéda en prison, incarcéré pour « pratique illégale de la médecine ».

  1. Comme pour nous rendre conscients de l’importance de l’action pour se maintenir en vie, le biologiste espagnol Faustin Cordon, (1909-1999), décrira le comportement de la « planula » des océans agrippée aux rochers, tributaire des flux marins pour se nourrir de plancton. Elle devra se séparer de son ancrage et s’autonomiser en devenant méduse pour s’alimenter de façon indépendante, la faim justifiant les moyens chez elle, pourrait-on dire !
  2. Nous citerons à plusieurs reprises Rosine Chandebois à la suite de Lynn Margulis, (1938-2011), USA, (voir son ouvrage « L’univers bactériel » (1986). Elle et son fils Roger Saban affirmaient l’unité « évolution – développement » en rupture avec Charles Darwin, celui-là même qui occulta Jean-Baptiste de Lamarck. Le mouvement symbiotique du vivant qui marqua le début de l’univers des cellules eucaryotes était impensable du temps de Darwin.
  3. Sollicitons maintenant le philosophe Michel Lefeuvre, grand connaisseur de l’œuvre de Rosine Chandebois. « Pour en finir avec le darwinisme », fions-nous à lui (2) lorsqu’il dit : « La critique du darwinisme commence ainsi : Pour fonder sa théorie de l’évolution des espèces, Darwin part du fait qu’au sein d’une même espèce, les individus se distinguent les uns des autres par des détails concernant leur morphologie. Il s’agit d’une « variation intra spécifique ». A ses yeux, cette différence est le fait du hasard. La première erreur de Darwin est déjà d’ordre méthodologique. Elle consiste à étendre au domaine de la descendance entre les espèces, c’est-à-dire à « l’interspécifique », ce qu’il a observé au niveau de « l’intraspécifique ». Le passage d’une espèce à une autre est d’un ordre de complexité autrement plus conséquent : les différences morphologiques entre les espèces exigent que le hasard se produise en un nombre incalculable, voire astronomique, de fois. Dans cette extension d’un domaine à un autre qui ne lui est en rien semblable, Rosine Chandebois souligne le manque de logique. « C’est comme si, écrit-elle, à partir du moins – la descendance d’individus de même espèce – on pouvait déduire le plus – la création d’espèces différentes. »  Merci à Michel Lefeuvre de nous instruire.
  4. Nous rajouterons que la diversité des espèces résulterait de la puissance variable et spécifique à chaque espèce de la pulsion de vie en fonction des forces antagonistes gravitationnelles pour les espèces aérobies. La nôtre aura dû braver ces forces nous conduisant, notamment, à la bipédie, ce que le paléo-linguiste Dereck Bickerton, (1926-2018), ne devrait pas contredire avec son ouvrage : « La langue d’Adam », préface de Jean-Louis Dessalles, (2010).

Indirectement, Thomas Pesquet nous renseigne à propos de cette force antagoniste à la gravitation qui aura contribué, pour les mammifères, à sélectionner un moment propice, le sommeil, pour réactualiser le phénotype mammifère lors des « rêves ». Nous rappelons que les tracés encéphalographiques sont communs aux mammifères, ce qui fera dire à Michel Jouvet, (1925-2017), que lors du sommeil paradoxal, notre espèce, en tant que mammifère, « réactualiserait la phylogénèse ». Il serait plus juste d’envisager, nous semble-t-il, les « rêves » comme le résultat de « la pulsion holographique et téléo-sémantique productrice de sens », Frédéric Paulus, (2000). Le sommeil « paradoxal » ne serait pas si paradoxal.

Cette pulsion accomplirait l’exploit d’imager, de mettre en images, une sorte « d’instinct imageant » des scénarios anticipateurs et transformateurs du psychisme, de ses habitudes et de ses comportements ; modifiant ainsi une personnalité quelque peu figée ontogénétiquement. C’est une hypothèse que nous devrons soutenir et argumenter ultérieurement.

  1. Dans ce sens, un chapitre spécifique devrait être consacré aux travaux de Michel Jouvet articulés à l’approche jungienne de la pulsion d’individuation lors des « rêves ».
  2. Je dois aussi mentionner vivement ma reconnaissance au Professeur Henri Laborit, (1914-1995), ayant déjà ressenti l’importance de ses travaux au Val de Grâce lors de mon service militaire.

Lorsque le chirurgien cessa d’opérer des estomacs ulcéreux, il devint le théoricien de l’inhibition de l’action, démontrant les physiopathologies des organismes entravés dans leur action sur des animaux de laboratoire (des rats ou des souris)). Je ne pouvais que confirmer ses découvertes dans le domaine psychique du fait de mes deux expériences de psychanalyse qui m’auront permis de retrouver ma santé.

Et avec l’inhibition inhérente à la crise du Covid 19, les travaux de Laborit auront été validés sur l’ensemble de la planète terre.

De surcroît, lorsque l’embryon est agressé, nous réalisons que cette inhibition peut toucher le bébé en plein développement. Les travaux de Rosine Chandebois ne font que renforcer cette évidence.

Nous avons encore confirmation de la valeur existentielle de l’action par l’exemple de l’interruption sélective des grossesses lorsque celles-ci sont multiples et que l’un des embryons n’est pas viable. Il est alors éliminé par la curarisation de ses muscles, paralysés. Ceux-ci entraînent la dégénérescence des tissus nerveux qui les commandent, et l’embryon est ainsi éliminé.

  1. Plus réjouissants, les travaux du neurobiologiste Francisco Varela, (1946-2001), nous présentent   des données multiples sur la créativité prodigieuse du vivant qu’il nommait « enaction » du vivant. Pour nous, cette créativité se retrouve dans ce que nous avons appelé les « rêves » activant ce que Carl Gustav Jung, (1875-1961), désigne la « personnalité 2 », celle sous l’influence de l’inconscient phylogénétique dépourvu des freins acquis comme peut être la « personnalité 1 » influencée par le mode de vie et l’éducation. Cette distinction « 1 » et « 2 » n’est pas un dualisme structurel pour autant.
  2. Ce vivant, qui se différencia chez l’humain par la bipédie en se confrontant à la gravitation, est ce que Thomas Pesquet réalise avec son expérience in « Ma vie sans gravité » (2023), chez Flammarion.
  3. N’oublions pas Antonio Damasio qui, avec son dernier ouvrage, situe (enfin !) le « ressenti », considéré comme « subjectif » par les sciences « dures »  antérieurement dans sa fonctionnalité à la connaissance ou la cognition. 
  4. Réunissons enfin tous ces travaux avec ceux de l’éminent psychanalyste suisse Carl Gustav Jung qui érige l’inconscient supra personnel en garant de notre individuation. Notre quête de sens irait jusqu’à rechercher une réalité, au-delà du réel, dans une France qui s’efforçait, d’une manière dogmatique, d’ignorer le (les) phénomène(s) de la foi religieuse ou des croyances ; où Sigmund Freud, (1856-1939), et spécifiquement en France Jacques Lacan, (1901-1981), auront réduit les croyances au niveau « d’illusions ».
  5. Et le cancer ? Nous l’interprétons comme une pulsion de vie des mitochondries s’échappant d’un « terreau organique » insatisfaisant à leur survie. 

En conclusion, Beljanski dira : « Le chercheur qui s’attaque à des problèmes du genre du cancer ou du sida soulève des montagnes d’hostilité sauf s’il appartient au petit cénacle qui détient la faveur du système et donc seul autorisé à entreprendre ce genre d’études. Sinon, les moyens de l’imprudent sont immédiatement réduits à leur plus simple expression, façon la plus efficace de l’empêcher de progresser ». p. 131, (1).

Beljanski fut attaqué pour médecine frauduleuse. Il décéda en 1998 d’une leucémie déclarée trois ans auparavant.

Réf :

[1] Monique et Mirko Beljanski, La santé confisquée, Ed Guy Trédaniel, 2010.

[2] Rosine Chandebois, L’embryon, cet inconnu, Ed L’Age d’Homme, Préface de Michel Lefeuvre, 2004. Et Pour en finir avec le darwinisme. Une nouvelle logique du vivant, Ed Espace 34 Montpellier, réédité, Ed L’Harmattan, 2022.

Frédéric Paulus

Animateur du CEVOI

Expert extérieur au Haut Conseil de Santé Publique

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