« Les enfants, j’ai raté l’avion »

[UN TEST DE 24 HEURES AVANT DE VOYAGER]

Il n’y a pas que les non-vaccinés à être « emmerdés ». Les voyageurs, titulaires de deux ou trois injections, sont eux aussi soumis à l’arbitraire des mesures dites de « freinage ».

Depuis le 28 décembre, il faut un test négatif de moins de 24 heures pour avoir le droit de monter dans l’avion et rentrer chez soi. C’est court, notamment quand on part un lundi. Combien de voyageurs, cette semaine, vont rater leur avion faute d’avoir pu se faire tester à l’heure? Combien de classes resteront fermées, parce que le professeur n’a tout simplement pas eu son test ?

Les informations nationales nous serinent avec l’engorgement des centres de test en France hexagonale. « Dix millions de tests effectués la première semaine de janvier », « les produits réactifs au bord de la rupture de stock », les protocoles pour l’école, et surtout l’explosion des cas de symptômes du Covid, il devient compliqué d’avoir accès aux tests, encore plus quand le temps est compté. Les témoignages affluent déjà. Untel s’est vu refuser l’accès à l’avion pour un test de 28 heures, le responsable du labo qui organise les tests à Orly qui prévient: « Ça va être long, il faut prendre rendez-vous et prévoir d’arriver six à sept heures au moins en avance », le chaos à l’école…

Se faire tester dans les 24 heures avant le décollage : un casse-tête.

Qu’on en juge. Philippe est parti passer les fêtes en famille. Quand il a pris son billet d’avion, et même son avion, il était prévu 48 heures pour s’acquitter de son obligation de test. En cours de séjour, il apprend qu’il faudra faire un test la veille du départ. Départ prévu un lundi à 15h30. Comment faire? Les labos, pharmacies et centres de dépistages sont fermés le dimanche après-midi et, venant de province, sa matinée se passera dans le train. Vite Doctolib ! La pharmacie du coin n’a déjà plus de créneaux lundi à la première heure, il faudra trouver un rendez-vous à l’autre bout de la ville. A l’heure dite, la secrétaire médicale l’informe qu’ « on ne fait plus de tests antigéniques, sauf exception ». Heureusement, un voyage dans l’après-midi a pu justifier d’une exception, le résultat d’un PCR n’étant attendu que « le soir », ou « au plus tard le lendemain matin ». Philippe a pu prendre l’avion, mais le moindre grain de sable aurait pu lui faire rater son voyage.

C’est comment qu’on freine?


Pourquoi tant de difficultés? Combien de contaminations économise-t-on avec ce dispositif de 24 heures? Il faut bien qu’il y ait une raison ! Nous l’avons demandée à la préfecture. « Il s’agit de protéger les territoires d’outre-mer, les plus éloignés et plus sensibles à la circulation du variant Omicron, plus contagieux et dont la période d’incubation est plus longue. Le raccourcissement des délais entre le moment du test et le voyage vise à éviter au maximum que des personnes puissent voyager en étant contaminées postérieurement au test », nous a-t-on répondu.

Pour autant, de l’avis même de Xavier Deparis, directeur de la veille sanitaire à l’ARS cité dans les colonnes du Quotidien du 13 janvier, d’ici fin février, à La Réunion, « toutes les personnes non vaccinées auront attrapé le Covid ». « La situation épidémique est la même en métropole, et le pic épidémique devrait se produire quasiment en même temps ici et là-bas »…

On ne peut empêcher la mer de battre, souligne le bon sens populaire. La vague Omicron est en train de tout balayer sur son passage, avec ou sans les mesures de « freinage ». Pourquoi maintenir la mesure et compliquer la vie des gens? Pour « emmerder »? Rappelons-nous que le port du masque en extérieur (mesure à 99% inutile pour ce qui concerne la transmission) avait été justifié « pour faciliter le travail des commerces qui n’auront ainsi pas besoin de le demander à chacun de leur client » pendant la première vague, et « pour montrer que la situation est vraiment grave » quand la mesure est récemment revenue. Jusqu’à quand allons nous être considérés comme des enfants, « C’est comment qu’on freine? J’voudrais descendre de là! »

Philippe Nanpon

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