COMMUNIQUÉ
Les gouvernements laisseront-ils des compagnies privées ratisser le fond des océans, patrimoine mondial de l’humanité, pour leurs intérêts industriels et financiers ? La question est sur la table alors que jeudi 16 mars débute une nouvelle session de négociations internationales en Jamaïque, au sein de l’Autorité internationale des fonds marins (AIFM), visant à autoriser ou non le démarrage de l’exploitation minière des océans. Si elle voyait le jour, cette industrie consisterait à envoyer des machines gigantesques racler les fonds marins à des milliers de kilomètres sous la surface afin d’y récupérer les métaux et minerais constitués en nodules.
Partout en France, dans une vingtaine de villes, les groupes locaux de Greenpeace France vont rappeler l’enjeu crucial qui se joue ces deux prochaines semaines pour l’avenir des océans.
À la Ravine Blanche, à Saint-Pierre, sur la plage, en face des jeux pour enfants, le samedi 18 mars, à partir de 8 heures, les militantes et militants du groupe local de La Réunion demanderont aux citoyennes et citoyens de se mobiliser aux côtés de Greenpeace et des autres organisations de la société civile, à l’occasion d’une journée nationale de mobilisation pour la protection des océans.
Derrière le message « Abysses : massacre imminent », affiché sur une grande bannière, ils sensibiliseront les citoyens et les appelleront à rejoindre un mouvement massif contre cette exploitation destructrice, notamment via une pétition qui a déjà recueilli plus de 155 000 signatures.
Dans l’océan Indien, l’exploitation minière en eaux profondes crée et attire les convoitises
L’île Maurice est particulièrement concernée par une potentielle exploitation minière. En janvier 2023, l’île a affirmé son souhait d’exploiter les minerais des fonds marins de sa zone économique exclusive. De plus, l’Autorité Internationale des Fonds Marins, a alloué des contrats d’exploration, comme au sud-est de Rodrigues, où l’on trouve des zones délivrées à l’Inde et à l’Allemagne, mais aussi à la Chine et la Corée du Sud. Une grande zone a été réservée par l’Autorité elle-même, pour être ouverte à des États ou à des entreprises privées. L’Inde en a déjà réservé une partie et la Chine aurait des vues sur cette zone également.
25 espèces de cétacés vivent dans l’océan Indien, dont la majestueuse baleine à bosses qui chaque hiver nous émerveille par ses sauts spectaculaires et ceux de ses petits : sommes nous prêts à les voir disparaître ? Sommes-nous prêts à laisser détruire les écosystèmes marins abyssaux féeriques autour de notre île ?
La France doit mener le combat à l’international
En novembre 2022, à la COP27 en Egypte, Emmanuel Macron s’est déclaré pour l’interdiction de l’exploitation minière des océans. Ce changement de position (le gouvernement français ayant dans un premier temps soutenu l’idée de l’exploitation) est intervenu suite à une forte mobilisation de la société civile, des scientifiques et des populations du Pacifique qui ont vivement dénoncé cette industrie.
« Ce revirement de situation est une excellente chose mais pas un aboutissement, rappelle François Chartier, chargé de campagne Océans chez Greenpeace France. Seule, la France ne pourra pas interdire à une exploitation commerciale de voir le jour, potentiellement dès cet été. Il faut désormais que la France et les pays anti-exploitation rallient une majorité de gouvernements et fassent bloc pour empêcher le déploiement de cette industrie. Nous serons extrêmement vigilants à Kingston : les engagements oraux doivent se concrétiser dans la diplomatie internationale. »
La dynamique est déjà en cours et l’opposition internationale à cette activité naissante de plus en plus forte. L’Allemagne a exprimé la nécessité d’un moratoire ou pause de précaution tout comme la Nouvelle-Zélande, le Panama, l’Espagne, le Chili, le Costa Rica et une alliance de pays du Pacifique. L’adoption récente à l’ONU d’un traité sur la haute mer, qui en soi ne protège pas les océans de l’exploitation minière, aura inévitablement des répercussions et pourra inciter davantage de gouvernements à se joindre à l’appel contre cette industrie.
Une industrie délétère pour l’environnement et le climat
De nombreuses recherches sont encore nécessaires pour comprendre la biodiversité et le fonctionnement des écosystèmes au fond des océans. Les scientifiques ont déjà mis en garde contre les risques importants que l’industrie minière ferait peser sur les écosystèmes océaniques, notamment les dommages irréversibles causés à des habitats uniques, les extinctions potentielles d’espèces et la pollution de la colonne d’eau. Un récent article scientifique souligne également l’impact potentiel du bruit de l’exploitation minière sur les espèces menacées d’extinction au niveau mondial, telles que les baleines bleues.
De plus, une autre étude démontre que les grands fonds marins ne fourniront pas les métaux nécessaires à la transition énergétique, réfutant le principal argument des compagnies minières. Des grands constructeurs automobiles se sont engagés à ne pas s’approvisionner en minerais des fonds marins et ont soutenu l’appel en faveur d’un moratoire. “Nous avons une occasion unique d’empêcher une industrie polluante de voir le jour. Plus que jamais, la mobilisation de toutes et tous est primordiale”, conclut François Chartier.
Le Groupe local de Greenpeace