LECTURE
Bien plus qu’un polar, le roman @rtificielle d’Olivier Denis propose une immersion dans le monde du web, des réseaux et de l’intelligence artificielle. A lire absolument !
Olivier Denis est belge (mouscronnois pour être très précis). Il est réalisateur en télévision : les images des 24h du Mans, de Roland Garros, c’est lui, tout comme des images de certains matchs de l’équipe de France de football, de rugby, voire quelques courses hippiques. C’est avant tout dans le domaine de la réalisation télévisuelle qu’il est connu et reconnu. Et pourtant, il trouve le temps d’écrire. Après Un couvert sur l’Estran et Miami Convergences, il vient de publier son troisième roman : @rtificielle.
L’IA sous forme de polar…
Dans ce roman qui, on l’aura compris, évoque l’intelligence artificielle et ses effets parfois pervers, on découvre d’abord que l’auteur s’est énormément documenté. Il montre à quel point il maîtrise son sujet, et connaît parfaitement le fonctionnement du web, de la téléphonie mobile, des GPS, … Même si, bien entendu, il s’agit d’une fiction, on ne sort pas indemne d’un tel roman, et le regard qu’on porte sur ces « technologies d’avenir » n’est plus le même qu’avant !
L’intrigue en quelques mots
La journaliste belge Kim Castellane apprend par la police espagnole que le corps de son père a été retrouvé sur une plage de Catalogne. Surprise par des échanges de SMS qu’elle retrouve sur le portable de celui-ci et qu’elle n’a jamais envoyés, elle décide d’enquêter. Elle découvre que le monde connaît une vague de suicides sans précédent. Les Etats interdiront pendant des mois les écrans, portables, … car l’IA serait la cause de dérèglements. Ce polar évoque l’emprise que pourrait avoir l’IA si elle n’est pas correctement encadrée. L’héroïne découvre ce qu’il pourrait advenir si l’intelligence artificielle venait à remplacer l’intelligence humaine. Ça peut faire froid dans le dos !
Le monde du journalisme en toile de fond
Olivier Denis étant réalisateur, il connaît bien le monde du journalisme. Il évoque longuement ce milieu et plus largement celui des médias. On y découvre le fonctionnement au jour le jour d’un média. Le bouillonnement perpétuel (téléphones qui sonnent, faxs qui arrivent, infos diverses qui tombent, journalistes qui s’interpellent, … On y découvre aussi le fonctionnement des conférences de rédaction, les rôles d’un rédacteur en chef, d’un éditeur en chef, comment on vérifie les sources d’une information qu’on coupe, qu’on recoupe avant de la diffuser. Sans parler du travail des caméraman, des preneurs de sons, du montage des reportages, … C’est passionnant !
L’IA indispensable dans de nombreux domaines
Nous savons tous à quel point l’IA est indispensable de nos jours, … pas seulement pour tchater avec un service client ou pour bachoter au lycée ou à la fac !
En apportant des réponses quasiment en temps réel, elle permet un gain de temps considérable, voire de productivité considérable. Grâce aux données du « Big Data » (mégadonnées), on l’utilise dans des tas de domaines : médecine, transports, logistique, gestion de stocks, GPS, … Aujourd’hui, s’en passer est impossible et illusoire. Mais les dérives sont-elles possibles ? Sans aucun doute ! Nous savons tous que nous sommes « traqués » en permanence (téléphone, GPS, ordinateurs, caméras, drones, CB, …) et que l’IA ne fonctionne nullement comme l’intelligence humaine. Elle n’a ni sentiments, ni émotions !
Les dérives possibles
Lorsqu’on voit ce qui se passe actuellement avec de nombreux réseaux sociaux, avec messages de haine non censurés, fake news et rumeurs à gogo, on commence à avoir un vague aperçu. Et on imagine bien quels dégâts pourraient découler d’une utilisation malveillante de l’IA (manipulation de masse, discriminations, cyberattaques…) ou tout simplement d’un gros bug ! Dans le roman, l’auteur va encore plus loin en imaginant ce qu’il pourrait arriver si l’IA venait à se nourrir elle-même de tout ce qui circule sur les réseaux et à devenir incontrôlable … Les hommes seraient-ils à ce point addicts qu’ils pourraient perdre la maîtrise ? L’intelligence humaine et sa création artificielle pourraient-elles finir par s’affronter, par s’opposer ?
Bien sûr, l’intrigue est celle d’un polar. Elle est à mon sens plutôt bien ficelée, mais par les infos véhiculées et les questions qu’il pose, l’intérêt de ce roman va bien au-delà de son intrigue.
Dominique Blumberger
Extraits
« Pour la pieuvre tous les non-dits qui font de nous des êtres émotifs, sont impossibles à classer, à décoder, à encoder. En fait, la machine ne déchiffre pas les nuances, nos sentiments, nos doutes. L’Intelligence artificielle ne peut pas interpréter notre absence de logique, la joie, la tristesse. »
« Je ne peux m’empêcher de me dire que si les hommes n’étaient pas totalement addicts à leur univers connecté, ils auraient pu trouver l’équilibre. Pourquoi faut-il toujours passer du noir au blanc, intervenir sans nuance ? Entre zéro et cent, il y a énormément de décimales, de dizaines et infiniment de possibilités cachées. Prendre plus de recul permettrait sans doute d’agir avec maîtrise. »
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