Afrohouse, Shatta, bouyon, amapiano, en créole en français et en anglais, Sueilo propose une musique éclectique aux inspirations diverses d’Erykah Badu à Nathy Peluso en passant par Beyoncé et Rihanna. L’artiste saint-pauloise nous a ouvert ses portes du studio intégré à sa maison où elle s’est exprimée sur ses débuts dans la musique, sa récente popularité, sa tournée des Francofolies et son point de vue sur la scène, le début de l’essor de la musique réunionnaise dans l’hexagone…
Comment as-tu commencé la musique ?
Dans ma chambre, en autodidacte. J’ai débuté à la guitare en apprenant des covers sur YouTube. Un ami de mes parents, Donato, m’a proposé de chanter un soir au Kazbar : j’ai fait un titre, puis un autre… Au début, je faisais des concerts guitare-voix de deux heures, uniquement des reprises. Ensuite j’ai joué avec plusieurs guitaristes, jusqu’à rencontrer Djouns, mon producteur.
Quelles sont tes références musicales ?
Nathy Peluso, Didi B, Erykah Badu. Et puis Beyoncé, Rihanna (la base), mais pour ce qui est un peu plus underground, c’est ce trio.
Tes textes parlent souvent d’amour. Tu évoques aussi le zamal, et même l’inceste dans un titre. Tu envisages d’élargir tes thèmes ?
La musique en général parle beaucoup d’amour, de drogue, de vie de quartier, parce qu’on écrit mieux ce qu’on a vécu. Si tu n’as pas le cœur brisé, c’est dur d’écrire une vraie déception amoureuse. À certaines périodes, j’avais besoin d’écrire sur l’amour ou le zamal : c’était mon exutoire mais je ne fais pas l’apologie de la drogue. Je veux juste être sans filtre et ne pas me brider.
Tu utilises toujours tes expériences pour écrire ou tu utilises ton imaginaire ?
Les deux. J’écris surtout sur ma vie et celle des gens autour de moi. J’essaie parfois d’aller vers l’imaginaire, mais c’est plus difficile pour moi. Quoi qu’il arrive, l’authenticité revient dans mes textes.
Ta carrière s’accélère : Green Room des Francos (2024), Sakifo (2025), Grande Scène des Francos cette année, Printemps de Bourges… tu es satisfaite de ton rayonnement actuel ou tu vises beaucoup plus haut ?
On vise toujours plus haut, sinon on stagne. Je ne rêve pas d’être une star internationale : je veux vivre de ma musique et voyager grâce à elle. Quand j’ai arrêté mon taf et mis la musique en plan A, tout s’est enchaîné. Être à 100 % permet d’accepter les dates, les interviews, les tournées. Ça a été très vite pour toute l’équipe, avec des phases de rush nécessaires. On redescend un peu aujourd’hui pour retravailler le projet.
Tu t’es déjà sentie bridée dans ton écriture ?
Non. En collaboration, certains beatmakers suggèrent des reformulations, je les écoute, ils ont l’oreille, mais je dis ce que je veux dire. Dans mon équipe, la règle c’est : tu peux tout dire si le fond est là.
« Pourquoi pas La Réunion ? »
Des artistes réunionnais (Barth, PLL…) commencent à percer dans l’Hexagone, tu sens une brèche pour vos sonorités ?
Carrément. L’idée c’est d’attirer le public avec des titres très streamables, puis lui faire découvrir nos lives avec du reggae, de la house, et de l’amapiano où les bangers arrivent à la fin. On voit aussi des artistes des DROM réussir en Hexagone et ailleurs ; pourquoi pas La Réunion ?
Ta vie a changé avec cette notoriété ?
Mon quotidien a changé : avant je travaillais en magasin, c’était du 9 h–19 h. Aujourd’hui, je dois adapter mon emploi du temps aux interviews, aux concerts, aux répètes. La tournée a été incroyable, mais aussi très épuisante et déficitaire : on a perdu nos économies. Donc non, je ne roule pas sur l’or, mais j’ai la chance de vivre un autre rythme, plus libre, même si parfois c’est du 5 h–minuit sans pause.
« Fé attention » raconte quoi ? C’est inspiré de quelqu’un ?
On l’a écrit avec Djouns sur une prod de DjLof Rikos. On voulait des images qui font rire, des moukatages, mais avec un vrai fond : fais attention à qui tu fréquentes, tu peux avoir des surprises. Ce n’est pas sur une personne précise, plutôt des situations vues ou vécues.
Qu’est-ce qui va arriver prochainement ?
Mon single « Grand Rasta » vient de sortir, avec Rikos. Je le joue en live depuis longtemps, il fallait qu’il existe enfin. En octobre, il y aura une grosse sortie avec un clip important, j’ai hâte qu’il sorte.
« La scène c’est super important »
Est-ce que tu bosses beaucoup sur ta scène ?
Énormément. Avec Djouns et mes musiciens, on veut un vrai show, pas juste une voix sur une instru. On repartira en résidences au premier semestre pour affiner, parce qu’on a beaucoup tourné et manqué de temps. Mon but : un live très qualitatif où chaque musicien a sa place.
Quel a été ton déclic pour en faire ton métier ?
Plusieurs éléments. La discussion avec Djouns a compté : « Avec toutes nos dates, tu pourrais être intermittente. » Voir que c’est possible m’a aidée à quitter mon travail. Les premières fois où on m’a reconnue dans la rue aussi. Et un souvenir fort : en Belgique, un monsieur m’a dit que, depuis quatre ans de Francofolies, c’était la première fois qu’un artiste lui donnait autant envie d’acheter un disque. Ça m’a confirmée que j’étais à ma place.
Ton mot de la fin ?
Croyez en vous. Donnez-vous à 100 %, visualisez votre objectif, la visualisation c’est la clé et ça finit toujours par marcher, que ce soit en musique, en art, en sport…
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