La « Maladie du Foie Gras » : un traîte dans nos assiettes

LIBRE EXPRESSION

Imaginez un organe vital qui se gorge silencieusement de graisse, jusqu’à perdre toute capacité à remplir ses missions essentielles : c’est la stéatose hépatique, plus connue sous le nom de « maladie du foie gras ». Sur le site du laboratoire d’imagerie Les Alizés, le Professeur Christophe Aubé, du Département de Radiologie du CHU d’Angers, tire aujourd’hui la sonnette d’alarme. Il alerte sur l’urgence de pouvoir détecter en amont la stéatose hépatique.

Elle peut se manifester parfois par une fatigue, une gêne abdominale ou un ballonnement, mais reste souvent silencieuse au début et réversible. Ces symptômes reflètent une inflammation avec fibrose progressive pouvant évoluer vers la cirrhose grave, ce qui rend essentiel un diagnostic précoce par imagerie et une intervention rapide pour éviter des dégâts irréversibles.  

Une invasion insidieuse

Notre foie, cette véritable centrale énergétique qui stocke le glucose, synthétise les protéines, neutralise les toxines et produit la bile, devient peu à peu une éponge graisseuse. 

Quand plus de 5% de son poids se compose de lipides, la stéatose s’installe et compromet la survie de nos cellules. Sans détection précoce, la maladie évolue en NASH (stéato-hépatite non-alcoolique), puis en cirrhose et cancer. 

Détectée à temps, cette maladie reste réversible grâce à des changements alimentaires et une activité physique adaptée, et un suivi médical précoce permet d’éviter les complications graves.

Des chiffres qui glacent

En France, déjà 220 000 patients souffrent de formes avancées et ce chiffre doublera d’ici 2030. Selon le journal « le nouvel observateur », aux États-Unis, ce sont 80 à 100 millions de personnes touchées, dont 6 à 8 millions par la forme la plus grave. 

Ce raz-de-marée sanitaire est largement alimenté par la malbouffe : trois quarts des produits industriels américains sont trop gras, trop sucrés ou trop salés, et près de 90% des personnes obèses présentent une stéatose. La malbouffe n’est cependant pas l’unique coupable ; l’absorption excessive d’alcool ou de certains médicaments peut également déclencher et aggraver l’accumulation graisseuse.

La Réunion en première ligne

Sur l’île, la surcharge pondérale concerne 47% de la population, dont 20% d’obésité. Plus alarmant encore, 18% des collégiens et lycéens et 6% des enfants de 3-4 ans sont déjà en surpoids. Un Réunionnais sur trois, des moins de 20 ans, consomme des boissons sucrées au moins quatre fois par semaine, et déclare régulièrement fréquenter les fast food particulièrement les moins de 20 ans.

« Agir dès l’enfance… » Dr Marie Fontaine diététicienne

« Nous devons comprendre qu’il ne peut y avoir de vie durable sans une agriculture en harmonie avec la nature », avertissait Pierre Rabhi, pionnier de l’agroécologie. Sur le site des Alizés, le Professeur Aubé insiste : la prévention commence dès l’école primaire, en réinventant la cantine pour qu’elle devienne un lieu d’apprentissage sensoriel, où chaque enfant découvre véritablement le goût des aliments. Des associations comme Oasis Réunion développent des jardins pédagogiques dans les écoles et organisent des ateliers culinaires pour familiariser les plus jeunes aux saveurs naturelles, tout en promouvant une alimentation durable, bio et locale, en partenariat avec des producteurs de la filière bio.

Les cantines scolaires sont de véritables laboratoires où les élèves expérimentent une alimentation variée et équilibrée. Elles proposent des menus conçus par des nutritionnistes pour répondre aux besoins de croissance et sensibiliser aux choix alimentaires sains. Par leurs animations et ateliers pratiques, elles favorisent l’acquisition de bonnes habitudes nutritionnelles qui perdureront toute la vie.

Cependant la prévention reste notre meilleure arme : 15 à 3 minutes d’activité physique quotidienne et une alimentation équilibrée peuvent inverser cette épidémie silencieuse avant qu’elle devienne fatale.

Je dédie cet article à Patrice P.  parti trop tôt rejoindre les étoiles «  à toi qui n’a eu de cesse de combattre cette maladie ».

Frédérique Welmant

Crédit photo mise en avant, libre de droit: Anna Shvets

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