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[Agriculture] Les paysans bio attendent toujours les aides européennes

RETARDS DE VERSEMENT

Les agriculteurs bio sont toujours pénalisés et n’ont pour la plupart toujours pas reçu le paiement de leurs aides. Dans le viseur, les aides Maec (Mesures Agro-Environnementales et Climatiques) et Bio. Selon la Préfecture, le retard serait lié a un problème informatique de la plateforme Pac. Elle a remis aux syndicats agricoles le 27 mai un document qui fait le point sur le versement des aides Pac.

Olivier* est agriculteur à Saint-Philippe. Bien que le travail soit dur, il aime son activité et son engagement en agroécologie qu’il met en pratique sur son terrain d’un hectare au Baril. Un peu “à la roots”, il n’a jamais demandé de subventions. “Je ne voulais rien demander et là je l’ai fait parce que la subvention correspondait exactement à ce que je faisais.”

Pour 1,09 hectare, il devrait toucher 5 753 euros. Le prix forfaitaire à l’hectare qu’il a obtenu est l’un des plus élevés, il est destiné aux “petites exploitations hautement diversifiées”. “Plus ton agriculture est complexe, plus tu mélanges les lianes, les arbres, arbustes, plantes basses, différentes cultures, strates, et espèces, et plus la Maec te promet un prix à l’hectare intéressant.” L’objectif : soutenir les exploitants agricoles qui s’engagent dans le maintien ou le développement de pratiques favorables à l’environnement et encourager la transition vers ce genre de pratiques.

“Sur le papier, c’était cool”

“Moi c’est déjà mon type d’agriculture. Sur le papier c’était cool. C’est exactement ce qu’ils devaient faire depuis longtemps. Pour faire une autre agriculture que celle conditionnée d’aujourd’hui.”

Pour valider le dossier, un diagnostic d’exploitation doit être réalisé sur le terrain par un agent du Parc national, afin de vérifier que les déclarations correspondent à la réalité de la production. Ensuite, l’agriculteur doit tenir à jour un suivi de son travail de la terre. “Il faut que tu listes toutes tes interventions, la date, le type de matériel, toutes tes fertilisations (la date, le produit, la quantité) et précisément les espèces cultivées sur chaque parcelle”, explique Olivier.

Depuis deux mois, l’agriculteur, qui a déjà rempli sa demande d’aide pour l’année 2024, est donc en attente de celle de 2023. Les 5 000 euros censés soutenir son activité retardent de petits travaux et réparations. Heureusement, lui ne compte pas sur ça, contrairement à d’autres. Un autre paysan, non loin de là, est en attente de son côté de 15 000 euros. Il a deux salariés sur son exploitation.

Problème informatique

“Et imaginez quelqu’un qui se lance”, fait remarquer Olivier. “Quelqu’un qui jusque là avait par exemple un karo de cacaoyers, mais ce n’était pas assez diversifié pour toucher la Maec. Alors il se dit que c’est l’occasion de changer de pratique. Il complexifie, il achète un motoculteur pour arrêter de mettre des pesticides. Ou alors il embauche quelqu’un pour faire en manuel. Il se dit que le salaire va coûter 15 000 euros sur l’année mais que ce sera compensé avec la Maec. Pour changer de pratique, ça demande souvent un investissement d’un autre ordre. Avec cette attente, tu le prends à la gorge.”

Du côté de la Préfecture, on nous répond que les retards de versement de la Maec sont directement liés à un problème informatique lié à la plateforme PAC. Le problème est national et relayé par les syndicats agricoles comme la Confédération paysanne.

Paiements probables fin juin à mi-juillet

Dans un document remis le 27 mai 2024 aux syndicats agricoles, dans lequel la Préfecture fait le point sur le versement des aides Pac, il est indiqué que celui des aides Maec et Bio est “incertain”. Les aides Maec concernent 838 contrats (dont 268 en canne) pour un montant de 5,9 millions d’euros. Les aides Bio, de leur côté, concernent 266 contrats pour un total de 1,3 million d’euros. Il est précisé : “calendrier annoncé par l’ASP (agence des services et des paiements, NDLR) : paiements probablement fin juin à mi-juillet.”

Le document de la Préfecture ajoute : “C’est une problématique nationale qui est bien prise en compte et en cours de résolution. Sur le territoire, plus de 89% des aides PAC ont été versées, mais il reste en effet ces aides MAEC en attente.”

Jéromine Santo-Gammaire

*Prénom d’emprunt

A propos de l'auteur

Jéromine Santo Gammaire | Journaliste

En quête d’un journalisme plus humain et plus inspirant, Jéromine Santo-Gammaire décide en 2020 de créer un média indépendant, Parallèle Sud. Auparavant, elle a travaillé comme journaliste dans différentes publications en ligne puis pendant près de quatre ans au Quotidien de La Réunion. Elle entend désormais mettre en avant les actions de Réunionnais pour un monde résilient, respectueux de tous les écosystèmes. Elle voit le journalisme comme un outil collectif pour aider à construire la société de demain et à trouver des solutions durables.