pesticides

Et hop, un pesticide de plus en missouk !

LIBRE EXPRESSION

L’information est passée inaperçue. Le Ministère de la Transition écologique a publié au Journal Officiel, le 4 août dernier (https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000047931677), un arrêté autorisant « par dérogation », la vente sur le seul territoire réunionnais, d’un biocide, le Friponil, pour une période de 180 jours.

Officiellement, il s’agit de lutter contre la fourmi folle jaune, très invasive, agressive (capable de coloniser de nouveaux écosystèmes, de supplanter les fourmis locales et même d’attaquer des oisillons dans leur nid), particulièrement urticante car elle produit de l’acide formique. Cette espèce de fourmi est désormais très présente à La Réunion, notamment dans les champs de cannes et d’ananas.

Mais voilà, le Friponil est un insecticide agricole tellement toxique que nombre de produits phytopharmaceutiques à usage vétérinaire en contenant sont interdits. Depuis 2013, l’Autorité Européenne de Sécurité des Aliments considère qu’elle présente « un risque aigu élevé » pour la survie des abeilles quand il sert dans le traitement des semences. En 2017, utilisé pour protéger les poules contre les poux, il était au coeur du scandale dit des oeufs contaminés. L’année suivante, ce puissant neurotoxique, nocif par simple contact, a fait l’objet d’une campagne active sur les réseaux sociaux pour que soient retirés des rayons animalerie ses produits dérivés (tel le Frontline) contre les puces et les tiques des animaux familiers … tant câlinés par les enfants.

En Guadeloupe et en Guyane, jusqu’en 2020, le Friponil, vendu sous le nom de Blitz, a été commercialisé pour lutter contre la fourmi manioc considérée comme un insecte ravageur des cultures. Gourmande, au point de dévorer les cannes à sucre, la fourmi manioc chemine dans les forêts avec son butin sur le dos ! Constat : le Blitz a finalement été interdit au vu de sa toxicité car constituant une menace pour les pollinisateurs et parce qu’il y avait un risque évident de transfert de cette substance active vers les eaux souterraines.

EELV Réunion mesure l’urgence de faire face à ce bouleversement écosystémique induit par la propagation de cette espèce de fourmi et les retombées négatives sur l’activité agricole, mais considère néanmoins que les niveaux de pollution provoqués par le Fipronil (résultant de l’usage autorisé dans le cadre de cette autorisation) sont susceptibles d’avoir un impact écologique dommageable sur un large éventail d’invertébrés (insectes, vers de terre …), et que ce pesticide constitue un risque létal non négligeable pour des animaux à sang froid, nous pensons au margouillat en particulier. De plus, cet usage peut négativement affecter des espèces utiles de fourmis qui occupent une place très importante dans certains cycles biogéochimiques favorisant la fertilité de certains sols, nettoyant et recyclant les cadavres d’insectes et les plantes en décomposition.

EELV Réunion demande le respect du principe de précaution et, pour lutter contre la prolifération de la fourmi folle jaune, prône le soutien aux programmes de recherche et l’utilisation de produits et procédés alternatifs naturels.

Notre île ne doit pas devenir une terre d’expérimentation de produits dangereux pour la santé (en premier lieu, celle des cultivateurs manipulant ces toxiques de contact) et notre biodiversité déjà exposée à nombre de risques naturels majeurs. Le scandale de la leucose bovine a fait de notre territoire le seul de France où on a pu commercialiser de la viande de boeuf atteint d’une forme de cancer. Nous ne voulons pas de ces dérogations ou de ces exceptions qui se font aux dépens de la santé publique et de la préservation de la biodiversité.

Geneviève Payet, Secrétaire Régionale d’Europe Ecologie Les Verts Réunion

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