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{L’Eko la Ravine] « Le gouvernement a sonné le glas pour la 11è fois en un an »

Georges Ah-Tiane est impliqué dans la vie associative depuis 1990. En France où il a vécu de nombreuses années, il s’est investi dans la promotion de la culture réunionnaise au travers de nombreux biais : en créant des associations, en enseignant le créole, en mettant en avant le patrimoine culinaire péi ou encore la musique. Il a créé des ponts entre La Réunion et la diaspora installée en France. Il a participé à une radio associative pendant douze ans avant de créer des fanzines ou petits journaux, « carry créole », « la lettre d’art’s ». De retour à La Réunion, il s’est impliqué dans la langue créole et « la conscientisation », avec l’objectif d’analyser la société réunionnaise, comprendre son fonctionnement. Dans le but de « voir quels sont les freins et comment les contourner pour aller de l’avant ». Cette chronique hebdomadaire fait suite à la gazette “kreo-lutionnaire” imprimée, l’Eko la Ravine, qu’il a tenue entre 2019 et 2020.

Avec la Réforme des retraites, le gouvernement jette un nouveau pavé dans la mare. C’est la goutte qui fait déborder le vase, stigmatisant la population française dans son ensemble et provoquant la colère des syndiqués et des citoyens dans l’Hexagone.

Il est dommage qu’à la Réunion, la population se cantonne dans une attitude tantôt passive, tantôt critique vis-à-vis des actions menées sur le terrain. Effectivement ici, tout le monde n’a pas forcément les moyens de faire grève tout en désavouant le monde syndical et politique, même si globalement on perçoit un soutien implicite des réunionnais sur les lieux de manifestation. Ou alors ce n’est peut-être pas suffisamment inquiétant pour déchaîner les foules ? Pas de quoi fouetter un chat ? Attention à l’arbre qui cache la forêt.

Mais l’heure n’est plus à se poser trop de questions, la réforme des retraites n’est qu’une étape, un jalon dans le programme que le gouvernement mondial dicte à ses « affidés ». Nous avons là, un Président qui semble dorénavant aux abois. Macron est au plus bas, il n’est plus crédible devant la grande majorité des français et sa réélection de Juin dernier n’était pas un plébiscite mais plutôt un barrage à l’extrême droite. De plus son narratif sur le covid et la guerre en Ukraine ne passe plus. Mais la catastrophe est déjà à notre porte et le pire peut encore arriver. Reste à nos élus à intégrer ces nouvelles données.

Ceci dit, nous devons tenir compte du contexte local, c’est-à-dire qu’au-delà de cette réforme des retraites qui devrait interpeller tout le monde, nous avons d’autres préoccupations et non des moindres. Si elle (la retraite) arrivera pour certains dans 10 ou 20 ans ou jamais… à la Réunion, notre quotidien nous rappelle que nous sommes des français de seconde zone. Malgré une politique basée sur l’assistanat, parce que nous vivons essentiellement par des subventions et importons quasiment la totalité de nos besoins, nous nous retrouvons dans des situations d’inégalités extrêmes. Beaucoup de réunionnais, ceux d’en bas, ne peuvent plus vivre décemment, ils survivent. La vie chère est devenue la première des préoccupations de nos compatriotes tout comme la réintégration du personnel soignant en extrême précarité… Pour ne citer que ces problèmes-là. Il faut trouver vite des solutions et se mettre dès à présent autour d’une table. Nous sommes assis sur un volcan !

Revendications locales

La majorité des élus réunionnais sont au répertoire des abonnés absents et ce quel que soit le mal-vivre de notre société (même la langue créole pose problème). Doit-on se soumettre sans conditions aux caprices du prince et de l’oligarchie mondiale sous prétexte de maintenir coûte que coûte « la paix sociale » face aux privilèges des nantis ? (Surrémunérés et classe supérieure exogènes et indigènes confondus). Ce n’est pas être jaloux ni envieux que de pointer du doigt ces inégalités-là.

Il est souhaitable que les syndicats qui légitimement mènent la danse depuis quelques temps, s’approprient certaines revendications « locales », comme il est attendu que les citoyens réunionnais s’expriment valablement et rejoignent les luttes sur le terrain. Stop aux critiques stériles et aux dissonances généralisées. Un travail collaboratif et communicatif pourra déboucher sur une vraie paix sociale. L’Union (sacré) fait la force.

Associations, artistes, société civile, citoyens, rejoignons et renforçons le mouvement syndical peï, dans les jours et semaines à venir afin de sortir de la spirale catastrophique dans laquelle on veut nous enfermer et les élus de tous bord seraient avisés d’accompagner ce mouvement, à moins que les intérêts persos priment sur tout.

Mais il faut surtout faire preuve d’efficacité et d’abnégation dans la résolution de nos problèmes. Concernant la vie chère, il ne sera pas suffisant de « geler « les prix ou d’élargir le Bouclier Qualité Prix, ni même de donner trop de crédit à l’ OPMR (*) qui n’est que consultatif.

Il faudra prendre des mesures durables comme le partage du travail, la préférence régionale réelle et appliquée, envisager des perspectives de production et d’emploi locaux (GPEC, agriculture, énergie…), imposer des déclinaisons locales au sein de la conférence territoriale… et surtout mettre en place des mesures d’urgence en soutien aux familles et individus en situation extrêmement précaires en créant un fond de solidarité (de l’argent il y en a) ainsi qu’un réseau vertueux de soutien.

L’avenir sera ou ne sera pas

Georges Ah-Tiane pour l’Eko la Ravine

(*) Observatoire des Prix des Marges et des revenus

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