Six entreprises pour vider la poubelle Tresta Star

[NAUFRAGE À SAINT-PHILIPPE]

L’hélicoptère, payé par l’Etat, a évacué hier une cinquantaine de seaux pollués des cales du Tresta Star. Six entreprises sont à pied d’oeuvre pour évacuer le mazout et les équipements électriques de l’épave.

Eric Mévélec, directeur de la Mer Sud océan Indien (DMSOI), s’interrompt. On ne l’entend plus. L’hélicoptère est en train de charger son « gros seau » d’un mètre cube d’eau mazoutée. Les rotations entre l’épave du Tresta Star et le camion qui récupère les déchets, se succèdent à un rythme d’une toutes les 4 minutes. Le polluant est ensuite évacué vers les décharges de Suez.

Hier après-midi, les six entreprises désignées par l’Etat sont enfin entrées dans le dur du chantier de dépollution. Une cinquantaine de rotation ont été effectuées. « Nous nous dépêchons car nous disposons d’une fenêtre de météo favorable jusqu’à dimanche », crie le DMSOI pour se faire entendre sous les hurlements de l’hélico. Sur le navire, les agents s’activent pour en dégager les équipements potentiellement polluants, mobiliers, électricité, électronique, etc.

Les associations écologistes (Attac, Greenpeace, etc.) et, à un degré moindre, le maire de Saint-Philippe ont estimé que l’Etat a trop tardé pour se substituer à l’armateur défaillant. De fait, il y a eu un épisode de pollution aux hydrocarbures entre le 17 et le 22 février sur les plages du Tremblet (Saint-Philippe) et de l’Anse des Cascades (Sainte-Rose).

La houle du cyclone Emnati a nettoyé le côté de Saint-Philippe. Les services municipaux et ceux de l’Etat se sont chargés d’évacuer les boulettes de mazout observées du côté de Sainte-Rose. Lundi, Eric Mévélec et Lucien Giudicelli, sous-préfet du Sud, ont défendu le bien-fondé des décisions de l’Etat depuis le naufrage du 3 février : « Nous avons placé l’armateur devant ses responsabilités de dépollution et nous nous substituons à lui quand il est défaillant ».

Dégradation ultra rapide de l’épave

Après trois mises en demeure, l’Etat avait donc décidé vendredi dernier de se substituer à la Tresta Trading Ltd (filiale mauricienne d’un groupe indien) pour palier le plus urgent : vider de leurs eaux souillées les cales du navire. On se souvient que la société Polygreen (engagée par l’armateur) avait procédé à l’évacuation d’une vingtaine de mètres cubes des cales bâbord du navire avant de repartir à Maurice.

Selon les constats de ces derniers jours, préliminaires des opérations de pompage débutées hier, c’est une centaine de mètres cubes de liquide pollué qui stagne dans les cales tribord du navire. Le volume augmente au fur et à mesure que l’eau de mer se mélange aux quelques quatre mètres cubes de mazout résiduels. « Les cales côté tribord seront pompées assez facilement, précise Eric Mévélec. En revanche il en reste une côté bâbord dont l’approche est plus problématique. Mais nous espérons avoir fini dimanche si la météo nous reste favorable ». Le navire militaire de soutien, le Champlain, reste à proximité mais il n’a pas été jugé nécessaire de déployer les barrages de protection en boudins flottants.

Cette opération est pour l’instant la seule qui se fasse aux frais du contribuables. Charge à l’Etat de se faire en suite rembourser par l’armateur. Celui-ci s’est montré défaillant la semaine dernière en ne proposant qu’une mission d’étude alors que la préfecture demandait de l’action. Mais les liens ne sont pas rompus pour autant et c’est à nouveau vers lui que se tourne l’Etat pour lancer le chantier du démontage du navire. Un chantier à plusieurs dizaines de millions d’euros selon le maire de Saint-Philippe.

L’opération s’annonce particulièrement compliquée. La dégradation ultra-rapide de la coque du Tresta Star semble être le signe d’un équipement de qualité très médiocre. Rappelons que la commune de Saint-Philippe a déjà lancé une procédure en justice. On n’est jamais trop prudent…

Franck Cellier

A propos de l'auteur

Franck Cellier | Journaliste

Journaliste d’investigation, Franck Cellier a passé trente ans de sa carrière au Quotidien de la Réunion après un court passage au journal Témoignages à ses débuts. Ses reportages l’ont amené dans l’ensemble des îles de l’océan Indien ainsi que dans tous les recoins de La Réunion. Il porte un regard critique et pointu sur la politique et la société réunionnaise. Très attaché à la liberté d’expression et à l’indépendance, il entend défendre avec force ces valeurs au sein d’un média engagé et solidaire, Parallèle Sud.