Une violation de domicile, des coups et blessures, et un suspect en liberté

LE TAMPON

Un agresseur présumé est actuellement en liberté au Tampon sur décision du procureur, car son état a été jugé incompatible avec une garde à vue. Cet homme, sous tutelle, est suspecté d’avoir commis une intrusion dans le domicile d’une jeune femme le vendredi 10 janvier et de l’avoir violentée. La jeune femme s’estime également victime d’une tentative d’agression sexuelle.

« L’idée de revenir vivre chez moi est très difficile, mais je ne veux pas laisser cet homme gagner », explique Sarah-Lou.

La jeune Tamponnaise suit désormais un traitement médical et un accompagnement psychologique à la suite de l’agression qu’elle a subie dans son appartement le vendredi 10 janvier.

Le suspect, identifié et interpellé par la gendarmerie, est actuellement en liberté à la suite de la décision du procureur de lever sa garde à vue (GAV).

Un inconnu dans son lit

Il est environ 5h30, ce vendredi 10 janvier 2025, lorsque Sarah-Lou se réveille face à un inconnu qui somnole encore dans son lit.
« Je n’étais pas tétanisée, j’ai eu le réflexe de sortir de mon lit, mais il s’est réveillé. Tout s’est passé très rapidement : il m’a frappée deux fois au visage, sur la lèvre et entre les deux yeux, puis il m’a attrapé les poignets pour me clouer au matelas. C’est à ce moment que j’ai hurlé dans son oreille, il a hurlé en retour, m’a mordu le bras, puis a pris la fuite par le balcon », raconte-t-elle.

La jeune femme appelle la gendarmerie, qui se déplace rapidement.
« Les gendarmes m’ont demandé d’aller faire constater mes blessures chez le médecin. C’est une faute : ils auraient dû m’y accompagner, car j’étais en état de choc. »

Le capitaine Cédric Masson, chargé de la communication de la gendarmerie de La Réunion, dément ce point :
« Les gendarmes n’ont aucune obligation d’accompagner une victime chez le médecin, sauf en cas d’urgence. »

Le suspect est interpellé peu de temps après, à 7h40, près du domicile de Sarah-Lou. Il est reconnu par la victime et placé en garde à vue. À 11h40, la garde à vue est levée par le procureur, car le médecin a déclaré l’état du suspect incompatible. Depuis, l’homme est en liberté.

« Les gendarmes ont essayé de me rassurer en m’apprenant que ce monsieur était sous traitement et qu’une infirmière venait faire une prise de sang quotidiennement pour s’assurer qu’il le prenait. Sauf que si son traitement marchait, il ne m’aurait pas agressée », fustige-t-elle.

Sarah-Lou n’est pas prévenue de la levée de la GAV, qu’elle apprend lorsqu’elle vient déposer plainte le lendemain.
« On ne m’a rien dit, je pensais qu’il était encore entendu. Et on m’annonce le lendemain qu’il a été libéré dans la matinée. Ils auraient dû me prévenir. »

« Nous n’avons pas d’obligation à informer de la levée de la garde à vue. C’est une possibilité, mais ce n’est pas obligatoire », nuance Cédric Masson. Mais pour Sarah-Lou, cette information était cruciale, car elle estime que l’agression était préméditée.

« Une agression préméditée »

« La nuit de mon agression, ma voisine a vu un homme assis sur le muret dans le noir complet en face de ma porte d’entrée, et la description correspond à mon agresseur. La première fois, vers vingt-deux heures, et la deuxième fois vers trois heures du matin. Avec son ami, ils ont essayé de regarder son visage avec un flash de téléphone, mais il s’est enfui en courant. J’ai fait une insomnie cette nuit-là, et je me suis endormie vers 4h après avoir éteint ma télévision. Je me suis réveillée à côté de lui vers 5h30. Comme les murs de l’appartement sont très fins, je suppose qu’il m’a entendue éteindre la télévision pour être sûr que j’étais endormie. C’était d’ailleurs le seul soir de la semaine où j’étais seule dans mon appartement. Je suis certaine que j’étais surveillée », précise Sarah-Lou.

« J’ai déjà subi une intrusion en septembre dernier. Je me suis absentée dans la nuit du lundi 30 septembre pendant environ trente minutes, une heure. Quand je suis revenue, mes placards étaient sens dessus dessous, mais rien n’a été volé, et une vidéo à caractère pornographique était diffusée sur ma télévision », poursuit-elle. Une intrusion qu’elle attribue au même homme.

« À ce moment-là, j’avais voulu porter plainte contre X le mercredi 2 octobre, mais le gendarme présent à l’accueil avait refusé, estimant qu’il n’y avait pas assez de preuves et que ça ne servait à rien. On m’a dit de rappeler la gendarmerie si ça se reproduisait », continue Sarah-Lou.

Le capitaine Cédric Masson rappelle qu’un militaire n’a pas le droit de refuser une plainte et remet en doute cet élément. « Le gendarme accusé de ne pas avoir pris la plainte était en congés quand elle s’est rendue en gendarmerie », s’étonne-t-il.

Un suspect en liberté

Aujourd’hui, Sarah-Lou ne dispose d’aucune mesure de protection, et le suspect est toujours en liberté. Comment cela se fait-il ?

Le suspect, un homme sous tutelle, a été déclaré inapte au maintien en garde à vue par un médecin. Le procureur a décidé de lever la garde à vue mais il aurait pu décider de l’hospitalisation ou du placement sous contrôle judiciaire.

« Pour moi, si le procureur a pris cette décision, c’est parce que les gendarmes ont mal fait leur travail. Quand ils ont pris ma plainte, ils n’ont pas tenu compte du fait que je me sentais victime d’une tentative d’agression sexuelle. Si je n’avais pas hurlé, je suis certaine qu’il m’aurait agressée sexuellement. Sinon, pourquoi dormir dans mon lit alors que j’ai des canapés, et pourquoi m’avoir clouée au matelas ? Quand j’ai expliqué ça, le gendarme m’a demandé si j’étais bien sûre, et on m’a dit que l’homme cherchait sûrement un endroit où dormir. Aussi, ma voisine témoin n’a toujours pas été contactée à ma connaissance. »

Selon le capitaine Masson : « L’officier de police judiciaire en charge du dossier assure avoir évoqué la question d’une atteinte sexuelle, et la réponse a été négative. Il faut avoir conscience que parfois les victimes ont l’impression d’avoir parlé d’un sujet ou d’avoir insisté, mais qu’avec l’émotion, elles oublient de le faire. Mais il est toujours possible d’ajouter des éléments à sa plainte. »

Contacté, le procureur en charge du dossier n’a pas donné suite à nos sollicitations.

Léa Morineau

A propos de l'auteur

Léa Morineau | Etudiante en journalisme

Cocktail de douceur angevine et d'intensité réunionnaise, Léa Morineau a rejoint l'équipe de Parallèle Sud pour l'éducation aux médias et à l'information, elle s'est rapidement prise au jeu du journalisme. A travers ses articles, elle souhaite apporter le regard de sa génération et défendre un journalisme qui rayonne au-delà des apparences.

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