CHU Réunion

[Evasan Mayotte/Réunion] Un système raciste

JOURNAL TÉMOIGNAGES

jeudi 20 avril 2023


Interrogé par Réunion la 1ère, Fanchon Oudjani, chargée de projet Cimade océan Indien a dénoncé l’évacuation sanitaire de « force des personnes d’un département français vers un autre département français ». Elle est revenue rapidement sur les résultats du prochain rapport de la Cimade océan Indien faisant état d’entorses aux droits des réfugiés entre La Réunion et Mayotte.


Dans un rapport à paraître, la Cimade* remet en cause l’application du protocole d’évacuation sanitaire (Evasan) entre Mayotte et La Réunion. Les évacuations sanitaires, ou EVASAN, sont des transports médicalisés de patients hospitalisés permettant l’accès à une offre de soins (diagnostic, traitement ou suivi thérapeutique) non disponible dans un territoire d’outre-mer ou de Corse.

Ces offres de soins sont réalisées entre territoires ultramarins, entre les territoires ultramarins et la métropole ou, entre la Corse et la métropole, par voie aérienne ou maritime. Ces transports sont régulés et organisés par le SAMU, selon le gouvernement.

Or la Cimade a constaté des rapatriements obligatoires, une stigmatisation des sans-papiers, un racisme évident envers des personnes dans le besoin.

L’évacuation sanitaire comble normalement les insuffisances des installations hospitalières de Mayotte. Ainsi, les personnes souffrants de maladie graves sont transférées à La Réunion par avion pour y être soignées. L’Evasan de Mayotte vers La Réunion concerne près d’un millier de patients par an.

Alors que le dispositif se veut humanitaire, la Cimade atteste que les patients mahorais, une fois pris en charge par le CHU de La Réunion sont ensuite systématiquement « rapatriés » dans le 101e département, ce qui est contraire à la liberté de circulation.

« Expulsions »

« Peu importe la façon dont elles sont arrivée à La Réunion, on ne peut pas transférer de force des personnes d’un département français vers un autre département français », a déclaré Fanchon Oudjani, chargée de projet Cimade océan Indien à Réunion la 1ère.

La présidente de la Cimade Réunion, Elodie Auzéole, a qualifié ces retours imposés d’ « expulsions ». Elle se pose d’ailleurs des questions sur la pertinence de ces « rapatriements » : « À quel moment on décide que les soins sont terminés, notamment quand la personne a besoin de suite de soins et de rééducation ? »

Certaines lois ne s’appliquent pas à Mayotte qui jouit d’un régime dérogatoire. De fait, un permis de séjour n’est valable qu’à Mayotte mais pas dans les autres départements, a indiqué la Cimade, ce qui complique le parcours de soins.

« Quand on n’a plus de papiers, on se retrouve dans un engrenage de précarisation, d’exclusion et là-dessus se rajoute aussi un large vernis de racisme et de discrimination », a expliqué Elodie Auzéole, présidente de la Cimade à La Réunion

Pour la Cimade, certaines de ces évacuations sanitaires pourraient être assimilées à une filière d’immigration sanitaire. L’association évalue à moins de 30 personnes par an, les patients qui devraient théoriquement rentrer à Mayotte et qui souhaitent finalement s’installer à La Réunion.

*association de solidarité active et de soutien politique aux migrants, aux réfugiés et aux déplacés, aux demandeurs d’asile et aux étrangers en situation irrégulière

Quotidien en ligne diffusé en presse-papier jusqu’en 2013 fondée en 1944 par le docteur Raymond Vergès

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