[Débat] « Métropole », « Hexagone »… pourquoi France cacher ton nom ?

POURQUOI PERSISTER À REFUSER D’APPELER UN PAYS DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE PAR SON NOM ?

La période de répression neo-coloniale des années 1960-1970 a laissé des traces dans les esprits d’habitants de pays qui subirent le colonialisme français, sinon pourquoi demander à remplacer « Métropole » par « Hexagone » plutôt que par « France » dans les futurs textes de loi ? La géographie rappelle qu’au même titre que la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, et La Réunion entre autres, la France est un pays intégré à un État : la République Française.

Mardi dernier, un député d’une ancienne colonie française devenue département en 1946 a fait voter un amendement. Il s’agit de remplacer le mot « Métropole » par « Hexagone » dans les prochains textes de loi. L’usage du mot Métropole pour qualifier la France est en effet jugé comme rappelant un passé colonial.

Aussi louable que soit cette initiative, elle montre l’ampleur du chemin à parcourir pour libérer le langage de toutes les séquelles d’un passé révolu.

Hexagone : où est ce pays ?

En effet, en regardant n’importe quelle carte du monde, force est de constater qu’il n’existe aucun pays appelé Métropole ou Hexagone. Par contre, il existe des pays comme La Réunion, la Corse, la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et la France entre autres qui sont intégrés dans un État, la République Française. Pour s’en convaincre, il suffit de se rendre devant l’entrée de la préfecture de La Réunion : son portail est surmonté des initiales RF, République Française.

Cette réalité géographique faisait auparavant partie du langage à La Réunion durant la période coloniale et juste après. Elle est restée dans des expressions telles que goyave de France (et pas de Métropole). Comme le rappelait fort justement le regretté Georges-Marie Lépinay, le remplacement de France par Métropole date des années 1960 sous l’impulsion de Michel Debré.

Debré importa la « Métropole » à La Réunion

Ce changement s’est fait dans un contexte neo-colonial de répression : toute tentative de faire reconnaître la richesse des différences de La Réunion avec la France était qualifiée d’indépendantiste par le pouvoir. Effacer le mot France et le remplacer par Métropole permettait alors d’entretenir la confusion, assimilant la France à la République Française, quand bien même les droits des Réunionnais étaient inférieurs aux ressortissants de la République vivant en France. Cette confusion était amplifiée par la « peur du largage » utilisée pour combattre le droit à l’autonomie des Réunionnais au sein de la République Française.

Une question d’égalité entre les territoires de la République

La page de la répression est tournée depuis longtemps. Le droit des Réunionnais à plus de responsabilité dans la République est une cause désormais partagée par la quasi-totalité de l’échiquier politique. C’est aussi plus largement une revendication de nombreux représentants des peuples des anciennes colonies intégrées à la République Française.

Mais cette période de répression a laissé des traces dans les esprits d’habitants de pays qui subirent le colonialisme français, sinon pourquoi demander à remplacer « Métropole » par « Hexagone » plutôt que par « France » ?

Appeler « France » la France plutôt que « Hexagone » n’est en rien insultant. Ceci ne peut que souligner que les habitants de la France et des « Quatre vieilles » colonies intégrées à la République sont des citoyens ayant les mêmes droits, qu’ils vivent en Europe, en Afrique ou en Amérique. C’est la reconnaissance de l’égalité entre citoyens d’un même État.

« Peur du largage » ?

La « peur du largage » continue-t-elle de faire des dégâts ? A-t-elle pour conséquence cette peur d’appeler la France par son nom, alors que ce pays est une partie de la République Française au même titre que d’autres pays qui sont, eux, clairement nommés ?

Ce sont des questions républicaines qui se posent au regard du vote de cet amendement et des débats qui en découlent.

Manuel Marchal (Témoignages du 29 mai 2023)

Sur le même thème, on peut lire aussi notre article « Métropole, l’alternative » publié en juillet 2022.

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