Nos cerveaux énactaient des images avant de parler

LIBRE EXPRESSION

Ou l’instinct de l’inconscient

Nous sommes redevables du terme « d’enaction », le fait « d’impulser hors de », au neurobiologiste Francisco Varela pour qui corps et esprit ne font qu’un ; dont les travaux relatifs à « l’inscription corporelle de l’esprit » (1993) nous auront permis de nous émanciper d’une vision dualiste cartésienne.

Celle-ci, de nos jours, exerce toujours une influence néfaste sur nos esprits, si bien que sciences biologiques, sciences médicales et sciences humaines sont abordées et enseignées séparément.

Dans ce contexte, il était inévitable que la production imagée du cerveau soit assimilée à des « rêves », alors que selon nos hypothèses, le cerveau des mammifères nos très anciens ancêtres devait disposer d’une sorte de clavier riche d’une multitudes de touches correspondant chacune, à une nuance imagée prédisposée à composer de manière pulsante des images. Si bien que celles-ci rassemblées pouvaient illustrer un message comme l’ARN est un messager de l’ADN.

Avec l’apparition progressive de la bipédie, et l’émergence du langage parlé et articulé devenu possible liée au cerveau gauche (pour les droitiers l’inverse pour les gauchers) la traduction erronée des images devint effective et leur interprétation (risquant d’être mensongère) furent relevées et décrites selon Michael Gazzaniga, voir plus bas, poursuivant l’œuvre de Roger Sperry.

Ces messages, émis, énactés selon une syntaxe et un vocabulaire d’images préfigureraient, avec les travaux du psychanalyste Carl Gustav Jung, des scénarios anticipateurs impulsant des transformations organiques et psychiques reliées. Et ce, dans la perspective de nous éclairer pour nous permettre de faire face aux alternatives ou épreuves qui pourraient advenir.

Ces hypothèses impliquent qu’une véritable intelligence de l’Instinct de L’Inconscient permettant de facto l’émergence d’une conscience plus éclairée, qui peut se libérer d’emprises culturelles, d’habitudes de pensées et de conditionnements dans nos façons d’être se manifesterait renouvelant notre devenir sans nécessairement le recours d’une psychanalyse.

Cette « conscience éclairée » pourrait être parasitée par des habitudes acquises imposées culturellement comme nous étant « favorables » : ainsi l’image des aliments sucrés dans l’alimentation, dès médications stimulants ou réellement toxiques, la liste est longue, ou encore des qualités humaines érigées en modèle, en fait des artéfacts culturels etc…

Ce courrier aura été énacté (rendu possible) par notre lecture de l’ouvrage « L’instinct de conscience, Comment le cerveau fabrique l’esprit », (2023), de Michael S. Gazzaniga.

Nous ne pouvons reprocher à Gazzaniga, non plus qu’aux chercheurs des sciences du vivant, isolés du fait de leurs spécialités, eux-mêmes acculturés d’une non intégration de cette dimension salutaire de leur inconscient et prodigieusement géniale des cerveaux chez nous humains, d’anticiper des réalités imagées favorisant notre libre arbitre dès lors protégé de jugements, d’idéologies ou d’alibis langagiers.

Frédéric Paulus
Animateur du CEVOI (Centre d’Etudes du Vivant de l’Océan Indien) à La Réunion
Expert extérieur Haut conseil de santé publique

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